vendredi 3 juillet 2015

Technocrates, vous avez dit technocrates ?


Décidément, la crise grecque, quelle que soit son issue aura eu au moins l’avantage de clarifier les points de vue. Après le « Il ne peut pas y avoir de choix démocratique contre les traités européens » de Jean-Claude Junker, l’obstination d’Angela Merkel dans la politique mortifère d’austérité, voilà le président du parlement européen, Martin Schulz qui appelle de ses vœux un "gouvernement de technocrates" pour en finir avec "l'ère Syriza".
Car, voyez-vous, la population est devenue incapable de comprendre ce qui est bon pour elle et elle ne pense qu’à son bien-être. Il faut donc que ceux qui savent, les personnes intelligentes et éduquées prennent les rênes. On pourrait imaginer que la responsabilité de ces personnes soit d’expliquer ce qui est bon afin que la démocratie puisse jouer son rôle. A quoi bon cette perte de temps, de toute façon, l’économie est devenue tellement compliquée, autant imposer les solutions sans chercher à les expliquer, c’est autant de temps gagné.
J’admets volontiers que l’économie est quelque chose de compliqué. Il n’y a qu’à voir les résultats obtenus dans le monde par ces « brillants esprits » : dépressions, récessions, plans de sauvetage, austérité, chômage, des efforts, toujours des efforts et toujours pour les mêmes, des inégalités toujours grandissantes.
Un humoriste disait un jour, « il faut prendre l’argent des pauvres pour le donner aux riches, comme cela il n’y aura bientôt plus de pauvres, il n’y aura que des riches et tout le monde sera heureux » ! Les néo cons n’ont pas compris que c’était de l’humour, c’est sans doute pour ça qu’on les appelle comme cela.
Martin Schultz n’est pas seul à penser que des « technocrates » peuvent seuls sauver la situation quand tout va mal. Souvenez-vous de l’Italie en 2011/2012. Mario Monti a été désigné premier ministre en remplacement de Silvio Berlusconi. Une année de gouvernement de ce « billant technocrate », ancien consultant de Goldman Sachs a, évidemment, permis de renforcer la confiance de la finance internationale en l’Italie et à faire baisser les taux d’intérêts payés par le pays, c’était quand même la moindre des choses avec un tel curriculum vitae.
Mais pendant cette année, le PIB italien a baissé de 2,4%, principalement en raison de sa politique de rigueur et le déficit est passé de 1,7% à 2,6% du PIB en raison même de cette récession. Quant au chômage, il est passé de 8,6% à 11,1% de fin 2011 à fin 2012.
Pour le Larousse, un technocrate est « un homme, une femme politique ou un haut fonctionnaire qui fait prévaloir les données techniques ou économiques sur les facteurs humains ». L’idée que seules ces personnes puissent gouverner un pays, ou gouverner l’Union Européenne est effrayante quand on pense qu’ils gouvernent justement, des êtres humains. En plus et c’est bien le pire, ils le font, pour la plupart, en toute bonne conscience puisque, comme l’expliquait Emmanuel Todd en 2002 déjà : « Les éduqués supérieurs, après un temps d’hésitation et de fausse conscience, finissent par se croire réellement supérieurs[1] ».



[1] Emmanuel Todd in, « Après l’Empire », éditions Gallimard, Paris 2002

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